samedi 19 août 2017

Quels projet de territoire pour des bourgs centres ?



Pourquoi aborder cette question de Bourgs centre et de de territoire, comme si la ruralité réveillée post 68 revenait au goût du jour ?

Une question de contexte

Il y a pas très longtemps le territoire national comptait 36 000 communes, autant de maires qui trouvent des sénateurs portes paroles et une organisation “cantonale” toujours vivace incarnée par les départements qui poursuivent la recherche de la survie dans le mille feuille administratif.
Tout cela fut très moderne, il y a deux bons siècles. Une énorme majorité de la population rurale pour une société agricole et mobile grâce au cheval. La journée de cheval détermina le périmètre du canton.
Désormais une petite journée de train permet de traverser l’europe, ou au moins le pays, le même délai en avion nous emporte à l’autre bout de la planète. La majorité des humains sont urbains, les agriculteurs sont ultra minoritaires en nombre, tout le moins en europe.

Une question politique

Mais l’industrie lourde qui transforma en moins d’un siècle notre civilisation, et l'écosystème de la planète, est déjà repartie soit vers d’autres continents, soit vers d’autres technologie.
Le coût des mégalopoles explose, pour les infrastructures, pour les fonctions de solidarités, pour la gestion des sols, celle des risques technologiques, terroristes, alimentaires. Sauf à tolérer la misère qui, toujours, se retourne contre la structure, l’ordre et la forme sociale.
La métropolisation française est en marche, accélérée par la restructuration régionale, par des liaisons rapides autoroutières, ferroviaires et aériennes qui font débat, euphémisme, sur les coûts écologiques, économiques et sociaux.
L’étalement urbain et une organisation en “entonnoir” survalorise des centres de moins en moins habités mais de plus en plus visités, embouteillés de lieux culturels, de commerces et des services. Le dispositif participe également à la centrifugation des implantations d’habitat, les plus pauvres à l'extérieur, une forte segmentation des marchés et de l’offre de logement avec la spécialisation qui l’accompagne, c’est la reconstruction des zones spécialisées et de l’assignation à résidence qui nécessite déjà, pour les ex ZUP, une politique de correction plus longue et plus coûteuse que leurs constructions.

Une question écologique

La métropolisation, tout au moins en France etat centralisé, ne peut plus reposer sur l’organisation post féodale des “Land” allemands ou sur des provinces hispaniques. Donc elle se structure autour de la logique consumériste, cherchant son identité dans le rayonnement économique. Cela implique, un rapport urbain réticulaire, des nappes urbaines ou des maillages de puissances urbaines. Les conséquences ont sont évidemment une consommation effrénée de terres agricoles malgré une importante montée des charges foncières. Durant 50 ans, la densité urbaines des opérations était à la baisse alors même que la population demande des parcs, des jardins et des espaces de loisirs collectifs. Le tout est amplifié par la baisse de la taille des ménages responsable de plus de la moitié de l’explosion des besoins de logements. Parallèlement les fonctions de transport deviennent prioritaires, en espace pour stationner les voitures, en coût pour les infrastructures, en risques de pollution de l’air, de congestion des structures viaires, en risques sociaux et en vulnérabilité aux terrorismes.

Aucune solution miracle mais des opportunités.


Un existant fort et qualitatif : le tissu des villes secondaires offre des capacités importantes, en bâti, en équipements, en ressources naturelles. Issues des périodes de développement précédentes, ces villes et petits bourgs sont structurées de façon moderne et agréable à vivre. Le tissu routier reste entretenu, celui ferroviaire qui a survécu n’est pas adapté à la grande vitesse mais ne demande qu’à reprendre vie, le contexte rural proche offre des capacités nourricières de qualité, la petite taille permet souvent des gestions de proximité engagées et efficaces. Un faible coût foncier et immobilier rend le choix de la petite ville compétitif.

Une évolution technologique, l’internet permet d’être virtuellement présent, de travailler à domicile ou, tout le moins, à distance. Les moyens d’information sont désormais identiques sur tout le territoire, télévision, journaux numériques, les différences d’accès se chiffrent en millisecondes. Une grande partie de la culture devient également accessible à domicile. Et concrètement l’éloignement en temps est parfois moins grand en lointaine périphérie que depuis certaines banlieues.

Une modification, partielle mais significative, des priorités sociétales : l’écologie. Les priorités commencent à bouger, les urbains idéalisent la campagne, rêvent de structures plus humaines et abandonnent progressivement, parfois sans choix, la consommation comme priorité pour “faire” eux même, s’engager et participer plus directement.
La vie en petite unité est plus efficace, chaînes courtes, locavores et économies circulaires trouvent cohérence dans des agglomérations de petite taille. Les promoteurs eux même redoutent les lourdeurs, les surcoûts et lenteurs des structures métropolitaines.

Des populations nouvelles arrivent donc, périurbains faisant des choix, militants et “bobos”, mais aussi retraités pauvres et déplacés économiques ou climatiques. Un gisement important de nouveaux investis pour les petites villes.

Des possibilités mais d’abord des conditions 

Qui dit bourg centre dit : bourg donc ville, donc “bourgeois”, non pas pour faire l’apologie d’une ex-élite du 19ème siècle mais pour signifier qu’il faut des populations variées, intellectuels et manuels, créatifs et pragmatiques, investisseurs et investis, expérimentés et apprentis. La ville c’est le lieu de convergence des intérêts.
Centre, seulement s’il y a des choses autour, une ville n’existe que grâce à son environnement, naturel, économique, humain, culturel. C’est donc une affaire d’agglomération, certes non suburbaine mais post-rurale ou périurbaine.

Choisir. Il ne pourra pas y avoir 30000 bourg centre, cela signifie que les élus seront peu nombreux et surtout que la compétition de proximité sera létale pour tous. Il faut donc trouver des modalités de négociations et d'associations gagnantes pour tous. Le développement urbain, à toutes les échelles, sera interurbain, intercommunal et collectif, mais il n’y aura que très rarement plusieurs centres. Celui ci aura des charges et des responsabilités mais devra également bénéficier du soutien de ses périphériques. Sans centre les périphéries seront des “bleds” puis des déserts. La solidarité est inévitable et plus elle sera précoce moins elle sera difficile.

Une “ingérence” publique est incontournable. D’une part la dynamique de marché continue de miser sur l'hyper métropolisation, donc ne se dispersera que rarement, d’autres part la ville étant une fabrication collective et organisée, il faudra toujours une puissance publique. Si elle doit se recentrer ce sera sans doute sur les questions d'aménagement, d’habitat, de développement et de soutien aux réseaux d’acteurs.

Des professionnels nouveaux, sont à inventer. Les élus seront maîtres (d’ouvrage) mais il leur faudra des opérateurs (aménageurs, économistes, maîtres d’oeuvres, constructeurs, animateurs). Les pratiques professionnelles actuelles se sont organisées à partir des standards opérationnels des trente glorieuses et parfois autour des enjeux de décentralisation mais toujours de façons fractionnée, disciplinairement mais aussi suivant les fonctions de leurs clients, architectes pour les promoteurs, urbanistes pour l’aménagement, géographes pour la programmation, juristes pour la réglementation, sociologues pour la compréhension des phénomènes sociaux, développeurs pour le développement, etc..
Les métiers sont à réinventer mais surtout les pratiques à mélanger, sans perdre de pertinence, ce qui ne sera pas simple ni gratuit.



Reste à inventer 

Un processus de travail. Comme la question de départ sera pour qui la ville doit elle s’engager, il faut un vrai travail de définition. Le “marketing urbain” répond en partie à la question, même s’il s’agit non de vendre le site mais surtout de déterminer qui peut, doit, souhaitera venir participer au développement de l’agglomération et à partir de ses motivations construire la bonne réponse qui provoquera l’engagement sur le territoire. Ce n’est pas un acte marchand mais un acte dans un marché.

Des équipes de “maîtrise d’oeuvre”ou plus exactement prioritairement de maîtrise d’ouvrage, évidement publique, de leurs collaborateurs et AMO et des multiples acteurs coordonnés. En matière d’urbanisme et d’aménagement ce n’est pas l’oeuvre qui doit prédominer mais la finalité de ses fonctions c’est à dire l’ouvrage.
Les équipes doivent être dans des cultures simultanément pluridisciplinaires et coopératives.

A suivre ….

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